Christophe Barraud analyse la situation macroéconomique sur ses trois zones de prédilection
Jeudi 15 mai, le Monaco Economic Board (MEB) a organisé en partenariat avec Monterra Wealth Management une conférence avec l’économiste Christophe Barraud, Chef Economiste et Stratégiste chez Market Securities et Directeur Général de sa succursale monégasque. Régulièrement désigné meilleur prévisionniste au monde par Bloomberg pour la Chine, les Etats-Unis et la zone Euro, l'expert a livré une brillante analyse de la situation, qualifiée “d’extrêmement agitée et volatile”.
C’est face au Palais Princier dans le restaurant CastelRoc que les dirigeants du MEB, Michel Dotta et Guillaume Rose ainsi que Xavier Midorge pour le sponsor de cet évènement Monterra Wealth Management, ont accueilli les plus de 80 dirigeants présents à cette conférence.
“J’ai quand même dit que Donald Trump serait élu, c’est déjà ça !” Le moins que l’on puisse dire, c’est que la période est compliquée pour les prévisionnistes de l’économie. Car malgré ses talents et ses nombreuses récompenses, Christophe Barraud concède que l’exercice s’avère risqué en cette période. Il a cependant proposé un exposé riche d’enseignements grâce à sa parfaite connaissance de ses trois zones de prédilection, la Chine, les Etats-Unis et la zone Euro.
En Chine, “le premier trimestre 2025 a été plutôt bon, puisque la croissance en rythme annuel était similaire au quatrième trimestre, soit 5,4% de croissance”. L'économiste note que la consommation a été robuste et semble indiquer que les stimulis du gouvernement pour relancer cette consommation mais également pour favoriser le tourisme et développer les infrastructures semblent commencer à porter leurs fruits dans un contexte où les exportations sont menacées par les tensions avec les Etats-Unis. Autre cap pris par la Chine, “un rebalancement sectoriel de l’industrie vers les hautes valeurs ajoutées qui s’accélère” (véhicules électriques, drones, etc.). Enfin, l'immobilier, “l’un des principaux freins de l’économie depuis bientôt cinq ans, commence à émettre des signaux positifs”. C’est l’une des raisons qui conduit Christophe Barraud à envisager une croissance plus optimiste que le consensus pour la Chine avec +5,4% en 2025. Et ce d’autant qu’un premier accord entre les deux premières puissances mondiales vient d’être conclu, ce qui devrait éviter aux Etats-Unis de rentrer en récession.
Concernant les Etats-Unis, justement, le PIB s’est contracté de 0,3% au premier trimestre, un phénomène dû à l’anticipation des droits de douanes avec “des importations stratosphériques.” Cependant si on se concentre sur le cœur de la croissance qui prend en compte la consommation et les investissements, on est à 2,6% “ce qui relativement satisfaisant malgré toute l’incertitude qu’on allait avoir au cours de ce premier trimestre.” Bien que Donald Trump soit prêt à faire des deals, “de nouvelles annonces de droits de douanes sectoriels sont attendus, ça va rester volatile” prévient l’économiste. Cependant le Président qui a vu sa côte de popularité chuter devrait assouplir ses positions et annoncer des baisses d'impôts pour relancer la consommation qui risque d’être touchée par un retour de l’inflation.
En Europe, Christophe Barraud voit deux raisons qui vont éviter à la zone euro de s’écrouler malgré l’incertitude et les droits de douanes. D’abord “une politique monétaire beaucoup plus accommodante” avec une baisse des taux qui favorise les crédits privés et donc la croissance. Mais surtout, ce sont les fonds débloqués pour la défense qui devraient soutenir l’activité, “on parle de 800 000 milliards d’euros sur les quatre prochaines années”. A cela s'ajoute l’annonce faite par l’Allemagne de stimuler par des mesures fiscales des investissements vers les infrastructures, pour 500 000 milliards d’euros sur 12 ans. “En termes d'impact et de stimulus (...), ce qui a été fait est considérable pour un pays qui avait un dogme sur la dette et où l’on ne souhaitait pas dépenser.” Si l’année 2025 s’annonce difficile, la locomotive économique européenne devrait redémarrer assez nettement en 2026 prévoit Christophe Barraud. Il s’est montré plus pessimiste concernant la France notamment en raison d'une dette qui ne cesse de croître, l’économiste regrettant une tendance “à augmenter les impôts plutôt qu’à réduire les dépenses inutiles.”
L’exposé de Christophe Barraud s’est ainsi révélé particulièrement instructif, étayé par de nombreux exemples concrets et s’est conclu par un échange de questions réponses qui s’est poursuivi sur la terrasse du Castelroc, dominant la mer. Un lieu idéal pour refaire le monde !


